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• 1561 au p. p.; provenç. deslabrar « déchirer »1 ♦ Rare Mettre (une chose) en mauvais état par usure, vétusté ou défaut d'entretien. ⇒ abîmer, 1. dégrader, détériorer. Le temps a complètement délabré cet édifice.♢ Fig. ⇒ gâter, ruiner. Délabrer sa santé par des excès.♢ Pass. Être délabré. ⇒ délabré.2 ♦ SE DÉLABRERv. pron.Cour. Devenir en mauvais état, menacer ruine. La maison se délabre. — Fig. « Ma santé se délabre au point que [...] il faut que j'aille voir et consulter Tronchin » (Rousseau).Synonymes :- dégrader- démolir- détériorer- esquinter (familier)délabrerv.d1./d v. tr. Compromettre la solidité de, ruiner. Ses excès ont délabré sa santé.d2./d v. Pron. Tomber en ruine. Monument qui se délabre faute d'entretien.— Fig. Un pays dont l'économie se délabre.⇒DÉLABRER, verbe trans.A.— [Le compl. d'obj. désigne une chose]1. Vx. [L'obj. désigne un vêtement, un tissu] Déchirer, mettre en lambeaux. À force de tendre et de détendre cette tapisserie, on l'a toute délabrée (Ac. 1798-1878).Rem. Ce sens attesté ds Ac. 1798-1878 ne figure ds la docum. que ds des emplois pronom. et au part. passé passif.— Emploi pronom. à sens passif. S'abîmer, tomber en lambeaux. Cette défroque qui a passé sur trois ou quatre corps en se délabrant me fait toujours mal à voir (TAINE, Notes Anglet., 1872, p. 41). D'uniformes point. Leurs vêtements [des paysans] se délabraient (HUGO, Quatre-vingt-treize, 1874, p. 16).2. Plus usuel. [L'obj. désigne une constr.] Mettre en mauvais état, réduire à l'état de ruine. Synon. dégrader, détériorer. Deux ans d'absence ont délabré ma masure (HUGO, Corresp., 1872, p. 322). Les vieux murs du château que délabraient les ouragans de la saison (ADAM, Enf. Aust., 1902, p. 524).— Emploi pronom. à sens passif. [Le suj. désigne une constr. et, p. ext., une chose concr.] Ce second étage ne nous servait à rien; il se délabrait (ZOLA, Conquête Plassans, 1874, p. 903). Le foyer déserté, (...) les choses familières à mon enfance se délabraient sans doute à l'abandon (LOTI, Rom. enf., 1890, p. 81).— P. anal., littér. Défaire l'apparence, l'ordonnance de (quelque chose). Décor grandiose que délabre l'automne (LORRAIN, Âmes automne, 1898, p. 59).B.— Au fig. [L'obj. désigne une pers., un de ses organes ou états]. Altérer profondément, atteindre, détruire. Ce régime austère qui délabrait sa santé et le conduisait lentement au tombeau! (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 2, 1859, p. 315). La fatigue, qui délabrait les jambes, tirait la face, ravageait le front (ZOLA, Œuvre, 1886, p. 334). Un pareil brouet délabrait irrémédiablement les intestins (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 278) :• 1. ... le paupérisme se caractérise par la faim lente, dont parle Fourier (...) qui sans cesse mine le corps, délabre l'esprit, démoralise la conscience abâtardit les races...PROUDHON, La Guerre et la Paix, 1861, p. 349.• 2. ... je cherche sur le visage de Jean la grimace héroïque et douloureuse qui dut délabrer celui de Max quand il lut (...) ma lettre d'adieu...COLETTE, L'Entrave, 1913, p. 73.— Emploi abs. Tous les traits enfantins encore, vieillis par le désir qui délabre et ennoblit (COLETTE, Ingénue libert., 1909, p. 142).— Emploi pronom. à sens passif. [Le suj. désigne une pers., physiquement ou moralement] Il est à craindre que votre poitrine ne se délabrât tout à fait (LAMENNAIS, Lettres Cottu, 1832, p. 234). Elle avait (...) vu son visage se délabrer lentement dans l'accès presque continuel d'une de ces fièvres (DUMAS père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 306). Les institutions se délabrent (SAINT-EXUP., Pilote guerre, 1942, p. 331). La morale se délabre et se consume (AUDIBERTI, Quoat, 1946, 2e tabl., p. 78).Rem. On rencontre ds la docum. le subst. masc. délabre, région. (Canada, etc.). Ruine, détérioration (d'une chose). Cf. délabrement. Attesté presque exclusivement ds la loc. en délabre(s). Ces antiques bâtiments voûtés qui tombaient en délabres (POURRAT, Gaspard, 1925, p. 16). Au fig. Il n'y a point de surveillance, point d'ordre ni d'économie dans cette maison : tout y est en délabre (J. HUMBERT, Nouv. gloss. genev., 1852, p. 143).Prononc. et Orth. :[
], (je me) délabre [
]. [
] post., partic. en position accentuée, est présent dans de nombreux mots de ce type empruntés à des lang. étr. telles que l'ital. ou les lang. germ. : il cabre, macabre, candélabre, sabre (cf. G. STRAKA, Syst. des voyelles du fr. mod., Strasbourg, Inst. de Phonét., 1950, p. 21). Seuls LITTRÉ et DUB. transcrivent [a] ant. DG donne [a] comme var. à [
]. Admis ds Ac. 1694-1718 s.v. deslabrer; ds Ac. 1740-1932 sous la forme moderne. Étymol. et Hist. 1561 (MAUMONT, Zonare, 53 E ds Fr. mod., t. 5, p. 74). Peut-être dér. de l'a. fr. label, lambel « ruban », v. lambeau, issu prob. de l'a. b. frq. labba, lappa « lambeau », cf. a. h. all. lappa « id. » (GRAFF t. 2, col. 38), m. h. all. et m. b. all. lappe (LEXER, LUBBEN), all. Lappen. Délabré pourrait être dér. de label par l'intermédiaire de (dé)labelé, devenu, par dissimilation, délabré. Pour une hyp. moins probable (lat. dolabra « sorte de houe », d'où, en Suisse, délabra « partager » puis fr. délabrer), v. REW4, n° 2717, EWFS2 et Pat. Suisse rom. t. 5, qui ne la retient pas. Fréq. abs. littér. :30. Bbg. Gloss. des pat. de la Suisse romande. Genève, 1972, t. 5, p. 228.
délabrer [delɑbʀe] v. tr.ÉTYM. 1561, p. p.; provençal deslabrar « déchirer », pour délabeler, de 2. dé-, et anc. franç. label, du francique labba « chiffon, haillon ».❖1 Mettre (une chose) en mauvais état par usure, vétusté ou défaut d'entretien. ⇒ Abîmer, dégrader, détériorer. || Le temps a délabré cet édifice. || Délabrer une tapisserie. || À force de la surmener, ils ont fini par délabrer complètement cette machine. ⇒ Démolir. || Délabrer des vêtements. ⇒ Déchirer; lambeau (mettre en lambeaux).2 Fig. ⇒ Gâter, ruiner. || Délabrer sa santé par des excès. || Délabrer un sentiment.1 (…) j'en étais à ce point excédé que je ne sais plus trop si mon exaspération n'avait pas à la fin délabré tout l'amour que j'avais pour elle.Gide, Si le grain ne meurt, II, II, p. 363.——————se délabrer v. pron.♦ Plus courant. Devenir en mauvais état. ⇒ Ruine (menacer ruine; tomber en ruine). || La maison se délabre. || Son matériel se délabre tout doucement. — Fig. || Santé qui se délabre. ⇒ Débiliter (se). — Faux pron. || Se délabrer la santé en travaillant trop. || Se délabrer l'estomac par une nourriture malsaine.2 (…) ma poitrine est en mauvais état, ma santé se délabre au point que, toute chose cessante, il faut que j'aille voir et consulter Tronchin.Rousseau, les Confessions, IX.——————délabré, ée p. p. adj.1 Qui est en ruine, en mauvais état. || Maison délabrée. || Vêtements délabrés, déchirés et usés.3 Des deux côtés du canal on voit les palais de Vénitiens, grands et un peu délabrés comme la magnificence italienne (…)Mme de Staël, Corinne, XV, 7.4 (…) pauvre manoir délabré, effondré, tombant en ruine au milieu du silence et de l'oubli, nid à rats, perchoir de hiboux, hospice d'araignées, près de s'écrouler sur son maître désastreux qui l'avait quitté au dernier moment, pour ne pas être écrasé sous sa chute.Th. Gautier, le Capitaine Fracasse, t. I, V, p. 123.5 (…) une vieille femme dont les vêtements délabrés étaient en parfaite harmonie avec la maison.Balzac, l'Initié, Pl., t. VII, p. 343.♦ Par ext. (Personnes). Vieilli. || Être tout délabré : avoir des vêtements en lambeaux.6 Délabrés, s'il en est au monde,Transis de froid, mourant de faim (…)Scarron, Virgile travesti, IV.2 Fig. || Fortune délabrée. || Santé délabrée.7 Sans moi vos affaires, (…) étaient fort délabrées (…)Molière, George Dandin, I, 4.8 Oui, pour le moment, ils sont tous bien (…) Moi seul, mon cher Félix, suis délabré comme une vieille tour qui va tomber.Balzac, le Lys dans la vallée, t. VIII, p. 953.9 Mais ses rares cheveux blancs, ses membres débiles et surtout la pâleur extraordinaire de son visage accusaient un tempérament délabré.Flaubert, l'Éducation sentimentale, I, III, Pl., t. II, p. 51.❖CONTR. Ferme, neuf, robuste, solide.DÉR. Délabrement.
Encyclopédie Universelle. 2012.